Tribune publiée dans Le Figaro du 16 juin 2022 sous la plume conjointe de Frédéric Rouvillois et Christophe Boutin.
Après l’abstention massive constatée au premier tour des législatives revient un marronnier, la question de l’introduction d’une «dose de proportionnelle» dans notre système électoral, pour compenser le manifeste déséquilibre né du mode de scrutin actuel, majoritaire uninominal à deux tours. Il est vrai qu’une fois encore la comparaison entre les résultats électoraux du premier tour de la présidentielle et ceux des élections législatives ne manqueront pas d’interroger: les projections actuelles donnent un nombre de sièges très modeste à un parti qui a recueilli 23,1 % des voix au premier tour de la présidentielle, permettant à sa candidate d’être présente au second tour, et bien davantage de sièges à un parti dont la candidate obtenait, elle, 4,7 % des exprimés.
Évoquer pour expliquer ce décalage une prime aux «élus enracinés» n’est guère convaincant, quand cet enracinement n’est jamais que le fruit du même déséquilibre de la représentation à l’Assemblée lors des scrutins passés. La proportionnelle et son évidente justice électorale sont donc à nouveau évoqués, et aussitôt, comme à chaque fois, les mêmes arguments sont avancés pour s’y opposer: elle serait contraire à la pensée gaullienne, conduirait à l’ingouvernabilité du pays, fragmenterait les partis et ferait le jeu des extrêmes. Il est temps de réfuter ces arguments: la proportionnelle pourrait, au contraire, revivifier le système politique de la Ve République sans le dénaturer. Le premier de ces arguments est celui d’une sorte de tradition française du scrutin majoritaire uninominal à deux tours, pour laquelle on ne manque pas, ici encore, de convoquer l’image tutélaire du général de Gaulle. Or, ce dernier n’a jamais sacralisé ce mode de scrutin, bien au contraire, puisque à la Libération il préconise une proportionnelle.
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