Synthèse et comparatif des programmes des candidats à la présidentielle pour traiter le problème des déserts médicaux
« Avant, la santé était le grand invisible des campagnes, introduit Henri Bergeron, directeur de recherches au CNRS et à Sciences Po. Si tous les candidats en faisaient mention, ce n’était clairement pas un sujet sur lequel se positionnait l’offre politique et sur lequel les votes se structuraient. On a beaucoup plus d’attention dans cette campagne. Et l’un des points d’entrée, ce sont les déserts médicaux, qui renvoient à l’existence d’au moins deux France. Or, cette France locale renvoie à de nombreuses questions très importantes, soulevées notamment par les « gilets jaunes ». »
Devenu un enjeu majeur de la santé pour cette campagne présidentielle, nous vous proposons donc ci-dessous une synthèse des programmes sous la forme d’un comparatif autour de 3 axes :
LIBERTE D’INSTALLATION DES MEDECINS SUR LE TERRITOIRE ET ACCROISSEMENT DU PERSONNEL DE SANTE :
S’il est réélu, le Président de la République a affirmé vouloir faire de la santé “un grand chantier” de son nouveau mandat en luttant en particulier contre les déserts médicaux. Ainsi, il souhaite lancer « une conférence des parties prenantes (patients, professionnels et élus locaux) pour construire les solutions locales et nationales ». Concernant la répartition des médecins sur le territoire, Macron ne souhaite pas procéder par la contrainte et privilégie la mise en place d’une quatrième année d’internat dans un désert médical avec en contrepartie une rémunération plus élevée et un accompagnement au logement sur la base du volontariat.
Le Président de la République a affirmé vouloir faire de la santé “un grand chantier” de son nouveau mandat en luttant en particulier contre les déserts médicaux.
Les candidats de droite sur l’échiquier misent davantage sur l’incitation pour attirer les praticiens dans les territoires délaissés.
Eric Zemmour, souligne d’emblée qu’il n’est pas question de remettre en cause la liberté d’installation car pour lui « la coercition n’est pas une solution » et risque d’entrainer un turnover important de praticiens dès qu’ils auront remplis leurs obligations induisant une forte déperdition dans le suivi thérapeutique des patients. Il préfère donc mettre en place un ensemble de mesures ambitieuses dans l’intérêt des patients et des soignants basées sur l’incitation. Pour lutter contre les déserts médicaux, il veut mettre en place un « conventionnement spécifique » avec un tarif de consultation plus élevé dans les zones en tension. Il veut également faciliter l’installation de nouveaux médecins dans ces zones aussi bien en tant que libéral qu’en établissement. Enfin, des actions d’accompagnement notamment dans le logement seront mises en œuvre pour favoriser leur implantation avec leur famille.
Pour lutter contre les déserts médicaux, Eric Zemmour veut mettre en place un « conventionnement spécifique » avec un tarif de consultation plus élevé dans les zones en tension.
Ainsi, Valérie Pécresse (LR) a-t-elle développé un programme ambitieux « Zéro Désert : moins de délais, moins de trajet » Pour atteindre cet objectif, elle souhaite créer une dotation de « lutte contre la désertification sanitaire » que l’Assurance maladie sera chargée de prévoir pour chaque région. Cette dotation permettrait de financer diverses actions en faveur de l’installation des médecins en territoire délaissé par les acteurs de la santé comme financer une 4ème année d’internat généraliste déployés en priorité sur les « zones en tension » ou offrir de meilleure rémunération en fonction de leur activité dans ces zones sous denses.
Marine Le Pen privilégie également cette approche basée sur l’incitation financière : « Agir contre les déserts médicaux grâce à des incitations financières fortes pour les soignants. » Un autre levier proposé par la candidate serait de moduler la rémunération de la consultation selon le lieu d’installation « un médecin qui choisit d’exercer dans la Creuse sera mieux payé qu’un médecin qui s’installe dans une grande ville où il y a beaucoup de confrères ».
RENFORCER LE MAILLAGE TERRITORIALE ET DEVELOPPER LA COORDINATION ENTRE LES DIFFERENTS ACTEURS DE LA SANTE EN MILIEU RURAL
Parmi les facteurs qui expliquent la détérioration ou la faiblesse de la qualité des soins dans un certain nombre de territoires, le manque coordination entre les différents acteurs de santé (médicales et paramédicales) apparaît majeur, responsable de défauts de transmission d’information, de manque de coordination, de surprescription, d’actes redondants qui impactent la qualité de parcours de soin. De multiples raisons expliquent ce cloisonnement entre les acteurs avec en particulier la question des modalités tarifaires existantes complexes qui mériteraient d’être modernisées mais d’autres leviers existent également :
Eric Zemmour veut mettre en place des services externalisés d’hôpitaux d’urgence (petites structures), de suivi thérapeutique et de prévention qui seront composés du panel de compétences prioritaire pour assurer une continuité des soins dans différentes spécialités partout en France.
Pour Eric Zemmour, la question du renforcement du maillage territorial est au cœur de la problématique des déserts médicaux et implique donc de lancer différentes mesures fortes. Dans cette perspective, il veut mettre en place des services externalisés d’hôpitaux d’urgence (petites structures), de suivi thérapeutique et de prévention qui seront composés du panel de compétences prioritaire pour assurer une continuité des soins dans différentes spécialités partout en France. Dans ces zones sous dotées, les régions et départements pourront également financer des structures accueillant des patients et des soignants avec mise à disposition de plateaux techniques pour faciliter l’implantation de cabinets libéraux ou de structures regroupant différentes spécialités. Il souligne aussi la nécessité de créer des unités fixes ou mobiles de soins palliatifs pour permettre à toutes les Françaises et à tous les Français d’amoindrir leurs souffrances physiques et morales.
Parallèlement, Eric Zemmour souhaite réformer en profondeur le système existant pour gagner en efficacité et en exhaustivité des soins proposés : ainsi, il souhaite revenir sur le T2A en introduisant une pondération, moderniser les fonctions support des structures de santé pour gagner en efficacité et en coordination (exemple : moderniser les parcs informatiques, avec des logiciels compatibles entre les différents établissements) ou encore faire évoluer la gouvernance de ces établissements (rendre le pouvoir aux médecins, limiter la technocratie). Il souhaite enfin rétablir un système de garde obligatoire pour les médecins sur l’ensemble du territoire organisé par le Conseil de l’ordre départemental. Durant ces gardes, les médecins auront d’abord un forfait par demi-journée, et ensuite un supplément de 30 euros par consultation.
Valérie Pécresse souhaite renforcer le maillage territorial via une approche locale en élargissant le pouvoir de décision des collectivités territoriales qui pourrait définir et mettre en œuvre des plans d’actions ciblées sur leur territoire pour gagner en précision et en efficacité. Elle souhaite également confier aux présidents de région la présidence des agences régionales de santé.
Valérie Pécresse souhaite renforcer le maillage territorial via une approche locale en élargissant le pouvoir de décision des collectivités territoriales qui pourrait définir et mettre en œuvre des plans d’actions ciblées sur leur territoire pour gagner en précision et en efficacité.
Marine Le Pen propose pour sa part de renforcer le maillage territorial en augmentant le nombre de maisons de santé et de les doter de moyens pour traiter les « petites urgences », comme les fractures mineures, afin de désengorger les hôpitaux. Elle souhaite également renforcer les liens entre les différents acteurs du système de santé (prévention, la médecine de ville, l’hôpital, le médico-social (handicap, Ehpad).
FORMER DAVANTAGE DE MEDECINS
Conséquence du numérus clausus des années 90 aggravée par le départ à la retraite de nombreux médecins, l’accroissement du nombre de médecins (généralistes et spécialistes) est un objectif partagé par tous les candidats.
La candidate des Républicains veut aussi « doubler le nombre de médecins formés d’ici 5 ans pour porter à 20 000 d’ici la fin du quinquennat le nombre d’étudiants admis chaque année en 2ème année. » Pour y parvenir, elle souhaite augmenter les capacités d’accueil des facultés de médecine et créer de nouvelles universités.
Eric Zemmour propose également un plan rationnel et progressif pour répondre à la fois à l’urgence comme au plus long terme. Ainsi, il veut accroître fortement le nombre de médecins et personnels soignants dès que possible tout en préparant l’avenir et en évitant les errements du passé. Concrètement, pour parer à l’urgence, il demandera à l’Etat d’embaucher aussi vite que possible 1.000 médecins (généralistes ou spécialistes avec une rémunération attrayante) qui seraient affectés directement dans les déserts médicaux.
Eric Zemmour demandera à l’Etat d’embaucher aussi vite que possible 1.000 médecins (généralistes ou spécialistes avec une rémunération attrayante) qui seraient affectés directement dans les déserts médicaux.
Il préconise également d’augmenter dès son arrivée au pouvoir le salaire des infirmiers et aides-soignants de 12 % pour les inciter à revenir travailler dans les hôpitaux mais aussi d’engager 40 000 personnes sur cinq ans. Pour préparer l’avenir, il souhaite doubler le numerus clausus et le nombre d’admis dans les filières de santé. A moyen terme, dès qu’un nombre suffisant de médecins sera formé, il faudra créer 1000 postes de médecins salariés dans les zones sous dotées qui permettront de pérenniser cet accès aux soins programmés ou non pour tous les Français. Dans une perspective plus long terme, il se dit favorable à l’implantation de nouvelles Universités privées dans différentes filières dont la Santé qui permettront d’accélérer la formation de professionnels médicaux en complément des formations publiques. Eric Zemmour propose également d’investir dans les nouvelles technologies comprenant en particulier un volet sur le développement des technologies de télémédecine pour renforcer les capacités de soin partout sur le territoire.