Chaque semaine, Le Figaro Magazine publie une nouvelle inédite d’un écrivain. Le 3 juin, c’est au tour de Frédéric Rouvillois, délégué général de la Fondation du Pont-Neuf.
« Quelle farce pitoyable! Et quelle bande d’esclaves, toujours prêts à acclamer leur maître ! » gronda Oliver, les mâchoires crispées de rage, en distinguant les premières notes du God Save the Queen! entonnées a cappella par la foule en liesse. Du bow-window où il s’était dissimulé, au troisième étage d’une maison louée pour l’occasion, il avait une vue plongeante sur la rue où des badauds avaient commencé à s’installer la veille au soir et qui était maintenant noire de monde, ronronnant de bonheur dans la brise tiède et prête à laisser éclater sa joie lorsque arriverait la reine.
«Ils ne méritent même pas qu’on essaie de briser leurs chaînes!» siffla Oliver. S’il avait pu, il serait descendu cracher à la face de ces misérables venus applaudir, pour son jubilé de platine, celle qui depuis tant d’années personnifiait leur servitude, leur renoncement à la raison et à la liberté! Heureusement qu’il y avait des gens comme lui, prêts à tout sacrifier pour instaurer la république !
La foule massée à ses pieds s’était imperceptiblement redressée, et à la gaieté du brouhaha se mêlait maintenant une gravité émue. Dans la rue pavoisée, les étendards multicolores de la vieille monarchie flottaient doucement au vent, comme si les éléments eux-mêmes avaient tenu à rendre hommage à «Sa Gracieuse Majesté».
Lire la suite sur le site du Figaro.