Dans une tribune au Figaro Vox, la philosophe Chantal Delsol dénonce l’emploi abusif et idéologique du mot « inclusif ».
Nous avons tous remarqué depuis quelques années que partout, dans la presse comme dans les textes de recherche, le concept d’inclusion a remplacé celui de «bien». On ne dit plus que tel discours, telle réforme, tel enseignement, est bon – probablement parce que nous ne savons plus très clairement quels sont les critères du bien, s’il y en a. Mais on dit qu’il est «inclusif». Ce qui suffit à classer favorablement et dans le camp de la vertu. Un changement de vocable n’est jamais innocent. Quand toute une société se met instinctivement à remplacer un mot par un autre, cela signifie grandement. L’apparition et le déploiement plénipotentiaire de l’«inclusif» traduit la reconnaissance collective d’un nouveau critère du bien, supplantant les précédents critères, d’origine chrétienne. L’«inclusion» ne renvoie pas seulement à un désir d’accueillir dans la société ou la communauté. Ce n’est pas un terme vague, et tel qu’utilisé aujourd’hui il a un sens bien précis.
Face à un élément extérieur ou étranger, nous connaissons au départ deux comportements. On peut l’exclure, c’est-à-dire le rejeter en dehors du cercle et de l’ensemble. Ou bien, on peut l’intégrer, c’est-à-dire lui ouvrir la porte en lui demandant d’adopter les usages du cercle et de l’ensemble. Mais, justement, le concept contemporain d’«inclusion» traduit un troisième comportement, différent du premier et du second, jugés l’un et l’autre insultants. Inclure, c’est permettre aux éléments extérieurs d’entrer dans le cercle en conservant leurs propres habitudes, cultures, handicaps ou autres. Ce n’est plus l’élément qui s’adapte à l’ensemble dans lequel il entre: c’est l’ensemble qui doit s’adapter à tous les éléments divers qui le rejoignent. Telle est la définition de l’«inclusion» – c’est un rejet de l’idée de norme. L’intégration, qui réclame au nouveau membre de se transformer au regard des normes de celui qui l’accueille, apparaît barbare. On peut dire que l’«inclusion» est la fin des canons. Chacun est à soi-même sa propre norme, ne se mesure à rien ni à personne, et vaut en tant que tel, sans comparaison d’aucune sorte.
Lire la suite sur le site du Figaro Vox.