Tribune de Christophe Boutin dans Le FigaroVox, au sujet de la décision rendue par le Conseil constitutionnel au sujet de la réforme des retraites.
La figure de l’arroseur arrosé reste un des grands ressorts du comique, et certaines réactions de juristes à la récente décision du Conseil constitutionnel sur la loi «retraites» nous permettent de goûter ce rare plaisir. On trouve en effet parmi les critiques les plus sévères de cette décision une part des plus éminents soutiens du juge constitutionnel, de ceux qui n’ont eu de cesse, depuis des décennies, de nous vanter cette avant-garde démocratique chargée, malgré un pouvoir rétrograde, et au nom d’un peuple parfois peu capable de percevoir par lui-même la direction des lendemains qui chantent, de faire évoluer notre société.
Leur principal reproche porte ici sur l’autolimitation qu’aurait opéré le juge constitutionnel dans son analyse de la procédure suivie par le gouvernement. Que ce dernier ait pu user de toutes les armes à sa disposition pour faire adopter sa réforme – le support de l’art. 47-1 des lois de financement de la Sécurité sociale, le vote bloqué de l’art. 44, les articles du règlement du Sénat permettant d’écarter des amendements ou d’écourter les débats, sans oublier bien sûr l’engagement de responsabilité de l’art. 49 al.3 -, voilà qui aurait dû conduire selon eux à une déclaration d’inconstitutionnalité. En s’y refusant par une lecture beaucoup trop formaliste, le Conseil serait resté finalement le «chien de garde de l’exécutif», défenseur des principes du «parlementarisme rationalisé». Reste que respecter l’esprit des institutions en s’en tenant à la lettre du texte constitutionnel n’est pas nécessairement choquant, et qu’il appartient sans doute plus au peuple souverain de modifier sa loi fondamentale qu’au juge de poser par sa jurisprudence les conditions d’un nouvel équilibre des pouvoirs.
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