Atlantico a interviewé Christophe Boutin, membre de la Fondation du Pont-Neuf, au sujet de la possibilité pour les réseaux sociaux de réguler les informations en fonction de leur degré supposé de véracité. Une tendance qui revient à confier aux GAFA le monopole du droit de discernement entre la vérité et l’erreur, ce qui n’est pas sans poser de nombreux problèmes.
Atlantico : Des réseaux sociaux comme Twitter ou Youtube continuent de considérer la thèse d’un virus échappé d’un laboratoire comme « complotiste », alors que de nombreux scientifiques (dont l’épidémiologiste Anthony Fauci) estiment qu’il faut considérer cette hypothèse. Est-il bon pour la démocratie que des réseaux sociaux s’arrogent le droit de dire ce qui est la vérité et ce qui ne l’est pas ? La régulation par algorithme ne fait-elle pas qu’accentuer le climat de défiance ?
Christophe Boutin : La première question serait de se demander pourquoi les réseaux sociaux ont pris une telle place en 2021 dans la diffusion des informations. Il ne faut pas se leurrer : en dehors du caractère attractif de l’image et du « surf sur le Net », si nos concitoyens, comme d’autres, se sont à ce point attachés à aller chercher des informations sur Internet, c’est qu’ils ne les trouvaient pas dans les canaux médiatiques habituels, ceux de la presse écrite, radiophonique ou télévisuelle, ou qu’ils les trouvaient abordées avec un biais qui ne leur convenait pas. Et s’ils y ont ensuite été happés par les réseaux sociaux, c’est parce que cette sociabilité virtuelle leur faisait oublier l’éclatement individualiste de notre monde.
Sur Internet, ils ont trouvé des médias et des blogs, avec des voix particulières, dissidentes, sortant en tout cas de la doxa commune – pour le meilleur comme pour le pire -, et donc les réseaux sociaux. Nul ne peut nier la part prise par ces derniers dans l’information des citoyens, et l’on sait les réserves que l’on peut faire sur la manière dont ils fonctionnent – en ce sans même évoquer le risque d’une influence extérieure. D’une part en effet, pour fidéliser leurs visiteurs, ils leur proposent un contenu en adéquation avec leurs recherches précédentes, ou leurs goûts tels que l’algorithme du réseau aura pu les déceler, ce qui les enferme dans une bulle. Par ailleurs, pour les maintenir en haleine, l’algorithme accroît la radicalité des contenus qu’il leur propose.
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